L’intelligence artificielle : menace ou opportunité ?
En mars 2025, j’ai eu l’occasion de discuter avec le journaliste Dennis Kastrup au sujet de l’impact de l’intelligence artificielle sur le métier de copiste. (Pour l’entrevue complète, cliquez ici). Lors de notre discussion, il m’a demandé si je croyais que mon métier était menacé par l’IA. Je lui ai répondu qu’à mon avis, elle représente plutôt une opportunité qu’une menace, et voici pourquoi.
L’intelligence artificielle ne traduit pas les variations expressives et le swing
L’IA a besoin de règles pour performer. La musique est, bien entendu, composée de règles. Il est donc logique de penser qu’une fois ces règles programmées, l’IA n’a besoin que d’entraînement pour transcrire avec précision n’importe quelle œuvre musicale. Cependant, il est crucial de garder à l’esprit que le rythme dans une œuvre musicale peut être souple et être interprété de manière plus libre. Lorsqu’un musicien ralentit ou accélère un passage pour l’adapter à son propos artistique, le rythme n’est plus constant, comme lorsqu’il joue au métronome. C’est ce qu’on appelle des variations expressives. Elles ne respectent pas les règles de base. Par conséquent, l’IA a du mal à se les approprier. De la même façon, l’IA ne traduit pas correctement le rythme swing utilisé dans le jazz. Cette façon de modifier les croches en retardant la 2e d’un groupe de deux est très intuitive, et pas tout à fait mathématique. Chaque musicien la ressent d’une façon propre. Il est par conséquent difficile d’en déduire une règle programmable.
L’intelligence artificielle représente une barrière technologique
Même si, un jour, l’IA parvenait à traduire les variations expressives et le swing, une autre barrière subsisterait pour le grand public, soit la barrière technologique. Tout nouvel outil technologique nécessite un temps d’apprentissage et d’adaptation de la part de l’utilisateur. Certains ne seront pas disposés à y consacrer du temps, d’autres n’en auront simplement pas la capacité (même en 2025, une transaction en ligne peut être difficile pour une part de ma clientèle, c’est pourquoi je leur offre de les aider dans le processus). Et même parmi ces gens qui auraient tout pour réussir la transition, il y a ceux, comme les directeurs musicaux de l’industrie, qui n’ont tout simplement pas le temps de gérer la portion « partitions » de leur production, et qui préfèrent en déléguer la gestion à des copistes comme moi. Et c’est là que ça devient intéressant : L’IA peut devenir un outil pour les copistes.
L’intelligence artificielle : un outil pour les copistes professionnels
À la lumière des tests que j’ai effectués récemment, il est impensable d’utiliser l’IA. Il y a tellement d’erreurs, qu’il est moins long pour moi de travailler seule que de me servir de cet outil. Toutefois, on pourrait imaginer que, dans plusieurs années, la performance de l’IA s’améliorera. Elle pourrait donc devenir un outil de choix pour un musicien aux oreilles entraînées, qui pourra déceler et corriger les erreurs de l’IA. En ce sens, les copistes deviendront peut-être un jour des spécialistes utilisateurs d’IA, plutôt que des professionnels désuets en voie de disparition.
En conclusion, l’intelligence artificielle fait maintenant partie intégrante de notre société, que nous la soutenions ou non. Toutefois, une chose est certaine : son utilisation dans le domaine musical soulève plusieurs enjeux, notamment en ce qui concerne le droit d’auteur. Est-il souhaitable que tout le monde puisse transcrire sa propre partition ?
En attendant que cela soit possible, je vous invite à acheter des partitions transcrites par des humains dévoués, et pour lesquelles les droits d’auteur seront acquittés. Pour en savoir plus, cliquez ici.